Clémentine
Rodriguez
« Je n’ai jamais vu de scandale
dans la prostitution, précise-t-elle. Ce sont les autres qui en voient. Le sexe
n’est plus un tabou, mais une obsession collective. La société de
consommation exige qu’on ne se prive de rien, pas davantage de l’orgasme que
du reste » Nelly
Arcan, extrait de Putain. |
La prostitution, entre fascination
et motif d’exclusion, la prostitution véhicule les fantasmes et nourrit les
débats. La réalité se heurte aux tabous. Doit-on tolérer cette activité
ou au contraire la blâmer ? Peut-on être une prostituée
assumée et heureuse ? Quelles en sont les limites ? |
Prostitution (du latin prostitutio) est une activité consistant à
échanger des relations sexuelles contre une rémunération. Bien que pratiquée
par les membres des deux sexes, elle est majoritairement exercée par des
femmes et consommée par des hommes. Le statut légal de la prostitution varie selon les pays et peut
également être classé de l'illégalité aux activités légales professionnelles.
Les revenus annuels de l'industrie de la prostitution sont estimés à plus de
100 milliard de dollars. Actuellement ce trafic d'êtres humains est décrit
comme le plus grand échange sexuel de l'histoire. |
Coucher
avec une prostituée, combien ça coûte ? |
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Les prix proposés par les prostituées sont très variables selon leur qualité
de service. Il existe des prostituées pour tous les budgets (voir
ci-dessous). |
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Prostituée de rue, comptez entre 20 € et 50 € selon la
prestation et l’endroit (allée mal éclairée ou derrière une tente de fortune). -
Prostituée dans les camionnettes, pour un service classique comptez entre 20 € et 50 €. -
Prostituée dans des appartements sans cuisine ni salle de bain, loué pour la prostitution. Comptez entre 30 et 70 €, selon l’humeur, la tête du client,
votre statut d’habitué et l’heure à laquelle vous passez. -
Prostituée du net (annonce sur internet où est précisé leur passage dans telle ou telle
ville, leurs prestations et tarifs et, bien entendu, un numéro de téléphone)
(1). Comptez en moyenne pour 30 minutes 150 €, et pour
une heure 250 €. -
Escort girls (ou prostituée de luxe). Leur travail c'est 70 % de psycho-socio et 30 % de sexe. Elles s'adaptent à tous les
rôles que veut leur faire jouer le client. Comptez
2000 € la journée. Cependant, il existe une réelle concurrence entre
les prostituées du net et les Escort girls. En effet, la prolifération sur le
site escort-annonce.com de prostituées roumaines proposant leurs
charmes via une agence étrangère suscite un véritable tollé chez les Escort
girls. Certaines Escort dénoncent ce phénomène, qui à long terme pourrait
menacer l’escorting. Les filles du net
se font passer pour des Escort en cassant les prix. Leur tarif est de 800 € pour
24 heures en moyenne alors que les Escort facturent 2000 € la journée
entière. Selon une Escort : « Ce qu’elles font est illégal, nous,
on déclare tout ce que l’on fait ». |
Se
prostituer relève t-il d'un choix ? Deux coccinelles s’accouplant sur un billet de banque… |
A présent, tout le monde sait que la prostitution est une activité
très lucrative. La grande majorité des prostitués de notre temps vendent leur corps pour
gagner de l’argent, parfois même beaucoup « trop » d’argent. La crise économique a poussée de plus en plus de jeunes à vendre leur
corps. “Donnez-nous des formations et des emplois, et on
fera autre chose”, une
phrase que Jean-Marc Monnier, sociologue, a trop souvent entendu, durant son
étude sur la prostitution chez les jeunes. A quoi bon faire des études pour gagner le SMIC alors qu'ils ont la
possibilité de gagner des sommes pouvant aller jusqu’à 400 € de l’heure. Dans
ce cas précis, je ne pense pas qu'il faille punir la prostituée. Le seul
responsable est celui qui est prêt à payer des sommes phénoménales pour
assouvir son fantasme sexuel. L'heure est grave, car il
y aurait environ 40 000 étudiants universitaires français, qui exerceraient
la prostitution de manière occasionnelle (2). Un avenir pour nos enfants ? Cependant, il existe deux autres catégories de Travailleuses du
sexe, qui, contrairement aux étudiantes,
sont prostituées à « pleins temps ». Le choix du terme
« travailleur du sexe » part d’un bon sentiment, exprime-t-il la
volonté de marquer du respect pour les personnes, le souci de ne pas les
exclure ? Dans un premier temps il y a les travailleuses conscientes du travail
qu’elles accomplissent et assument complètement leur désignation de
« putes ». Ce choix individuel s’appuie sur une idée de liberté.
Elles dénoncent toutes les féministes qui hurlent à la honte de ce métier.
Car ces femmes se sentent utiles à la société, elles pensent pouvoir avoir un
rôle « apaisant » pour les hommes. Certes elles n’empêchent pas les
viols, les tromperies conjugales, mais le temps d’un instant elles permettent
à une personne, bien souvent très complexée, de se laisser vivre,
d’abandonner quelques minutes l’enfer de son extérieur, décrocher de ses
responsabilités, laisser son corps et son cœur exprimer des envies, des
fantasmes qu’il ne pourrait demander à la mère de ses enfants. Puis il y a les prostitués touchés par l’énorme industrie qui pousse
femmes, enfants, jeunes gens à la prostitution. Les souffrances sont bien
souvent le lot des personnes qui se prostituent, souffrances subies dans le
silence et l’indifférence. La responsabilité des clients, pour qui l’argent est un moyen de se
dédouaner, d’acquérir un droit à l’irresponsabilité et à l’indifférence
vis-à-vis d’autrui. « J’ai payé, j’ai donc tous les droits. » La responsabilité de la société toute entière qui tolère, voire
encourage cette exploitation quotidienne, croissante et généralisée. Car les marchés du sexe représentent des enjeux financiers
considérables. S’il est difficile d’évaluer le chiffre d’affaires de la
prostitution, on estime qu’il pourrait atteindre une dizaine de milliard
d’euros annuels en France. On sait qu’il est en constante augmentation. On ne se prostitue pas par hasard, mais en réponse à un
itinéraire personnel douloureux, lié à des difficultés socio-économiques et à
la rencontre de personnes ou de groupes relais permettant l’entrée dans la
prostitution. |
La
limite de la prostitution : le proxénétisme |
« On dit que l'esclave a disparu de la civilisation européenne.
C'est une erreur. Il existe toujours, mais il ne pèse plus que sur la femme,
et il s'appelle prostitution ». Victor Hugo, Les Misérables, 1862. |
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Le proxénétisme est une activité consistant à tirer profit de la
prostitution d'autrui ou à la favoriser. Il sert d'intermédiaire, vit en relation
entre le ou la prostitué(e) et celui qui la rémunère. Les sanctions prévues par la loi sont lourdes et vont jusqu'à cinq ans
d'emprisonnement et 150 000 euros d'amendes. Le ressort de la « dette » est un ressort fondamental du
proxénétisme. Il permet de maintenir les prostituées dans la dépendance. Mais
que le proxénétisme soit exercé par des réseaux ou non, cette dépendance
peut-être entretenue par des moyens extrêmement variés : menaces contre les
enfants, la famille, la drogue...(3) |
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C'est ce qui se passe pour les Thaïlandaises avant de quitter leur
pays. Pour fuir la misère de leur pays, elles signent un contrat, dont bon
nombre des clauses sont abusives, mais elles savent qu'elles devront rembourser
leur passage aux Pays-bas aux différents intermédiaires qui les ont fait
venir. Mais la soumission de la femme prostituée n'est jamais aussi totale
que lorsque le proxénète joue alternativement de la violence et d'un semblant
de tendresse, feignant de rendre service et de faire des cadeaux, ce qui
suscite à la fois crainte et fascination chez sa victime. En état de grand
manque affectif, nombre de prostituées préfèrent un faux-semblant d'amour à
une absence complète d'amour. Certains croient alors pouvoir mériter
davantage l'affection du proxénète en lui apportant toujours plus d'argent.
Nous voilà entré dans un cercle infernal. Cependant,
l’usage d’un nouveau vocabulaire, allié à l’idéologie du Tout Économique,
aboutissent à faire entrer le proxénétisme dans le champ de la libre et
normale entreprise. Les "managers" ou "entrepreneurs
du sexe". Tout est bon pour faire marcher l’économie. Système
habile, le proxénétisme s’est adapté avec insolence aux nouveaux modes de vie
et de communication, de l’avion dégriffé à l’Internet. |
Handicap : accompagnement sexuel ou
prostitution ? |
Pourquoi le sexe, sa marchandisation est-elle
tellement stigmatisé dans une société où tout se vend, s’achète sous les
auspices gracieux des lois du marché ? Souvenons-nous du reportage de Jean Michel Carré, les travailleu(r)ses
du sexe (diffusé sur France 2 le 22 octobre 2010) (4). Depuis longtemps, les prostituées ont droit à
l’amalgame entre prostitution et exploitation sexuelle qui porte physiquement
et psychologiquement atteinte aux femmes, et qui considère leur corps comme
une marchandise pouvant être achetée et vendue. Mais la prostitution est
aussi, selon plusieurs associations de prostituées « une activité
humaine » que l’on doit libérer de ses anciens asservissement sacrés,
culpabilisateurs et répressifs. Mais si l’une d’entre elles se rebelle et
revendique sa liberté de se prostituer, de disposer librement de son corps,
elle sera de suite taxée : « non représentative, égoïste, salope,
nymphomane, forcément perturbée, légitimant les viols ». Une personne
qu’il faut nécessairement punir : contrôle fiscal, retrait de la garde
des enfants, amendes, PV, humiliation, harcèlement, expulsions, sans retraite
ni sécurité sociale. Aucun droit ne leur est accordé. S’il faut lutter efficacement contre le
proxénétisme et les réseaux de traite, les politiques devraient peut-être
aider les prostituées à obtenir un statut de travailleuses indépendantes avec
l’application des droits et des devoirs assimilés. Briser les tabous. En finir avec l’hypocrisie. La
demande de création de « services d’accompagnement sexuel pour les
personnes handicapées » est partout présentée comme un progrès vers
plus d’égalité, de citoyenneté, de justice. Dans ce reportage, a lieu un témoignage
bouleversant, c’est celui d’une dénommée Marianne, femme âgée de 40 ans,
prostituée depuis 17 ans. Un jour elle rencontre un neuropsychiatre qui lui
parle du désespoir des hommes et femmes handicapés qu’il a dans son service et
qui parfois, n’ont jamais eu de rapports sexuels et/ou ne pourront plus
jamais en avoir. Marianne, touchée par cette situation, va peu à peu se
spécialiser avec ce type particulier de clientèle. Après quelques mois de
pratique, qui lui donne encore plus qu’avant le sentiment d’être utile,
le médecin lui avoue que ses patients prennent moitié moins de médicaments
depuis que Marianne les rencontre. Avec ces hommes et ces femmes handicapés,
elle découvre véritablement les signes du corps et se sent vivre des
aventures passionnantes et différentes à chaque fois. Elle tente aujourd’hui
de former d’autres prostituées dans ce domaine où la demande est
malheureusement importante et s’est lancée depuis deux ans dans une formation
d’infirmière psychiatre. Peut-on à présent dire que la prostituée ne joue
aucun rôle pour la société ? Le
combat des personnes handicapées, parfaitement légitime quand il touche à
leur droit à l’intimité et à la dignité, peut-il être soutenu quand il exige
la création d’une "profession" dédiée au plaisir sexuel ? |
Notes : (1) Site
internet avec annonces de prostituées : http://www.6annonce.com/ (2) Source :
DH.be. http://www.dhnet.be/infos/monde/article/159152/40000-etudiants-francais-se-prostituent.html (3)
NOR Malika, GAUTIER Thibault. La prostitution.
Paris : Le Cavalier Bleu, 2001. 128 p. Collection Idées reçues. (4) Site officiel du film : http://www.films-graindesable.com/les-travailleuses-du-sexe/index.php |
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Quelques
citations : - « Le cinéma, ce nouveau petit salarié de nos rêves on peut l’acheter
lui, se la procurer pour une heure ou deux, comme un prostitué. » Louis Ferdinand Céline, extrait du Voyage au bout de la nuit. -
- « L’écriture
ressemble à la prostitution. D’abord on écrit pour l’amour de la chose, puis
pour quelques amis, et à la fin, pour de l’argent. » Molière. -
- « La
prostitution est un phénomène masculin. » Françoise Giroud. -
- « La
prostitution marcherait moins bien si les hommes n’avaient pas besoin de se
confier à tout prix. » Frédéric
Dard extrait d’Emballage cadeau. -
- « A
Hollywood, on traite les acteurs comme des meubles dont la valeur est
calculée sur l’argent qu’ils rapportent aux autres. Pour moi, c’est la
meilleure définition de la prostitution. » Linda
Fiorentino. |